Rencontre avec Orphée dans les grottes du Sabarthez

Comme nous avons pu le voir plus haut,les grottes d’Ussat sont propices à l’imaginaire.
Cette année, nous avons eu la chance de faire découvrir nos antres magiques à un groupe de chercheurs bulgares passionnés par les anciens cultes orphiques et les rites solaires et chthoniens. Parmi eux, Valeria Fol, Professeur à l’Institut de Thracologie à l’Academie Bulgare des Sciences de Sofia, a remarqué et noté les similitudes existant entre les grottes d’Ussat et les grottes sacrées qu’elle a étudiées en Bulgarie.
Pour ces chercheurs, il est incontestable que les grottes d’Ussat et d’Ornolac sont des cavernes initiatiques, des hauts lieux de cultes anciens comme il en existe partout en Europe et notamment au pays des anciens Thraces qui semble en être le berceau.
Le culte voué à Orphée ne nous est connu qu’imparfaitement à travers le mythe grec d’Orphée descendant aux enfers récupérer Eurydice.
Si l’on approfondit le symbolisme de ce mythe, on peut s’apercevoir qu’il nous raconte une cosmogonie monothéiste et dualiste qui pourrait être la source de toutes les religions indo-européennes. Ce n’est nullement un culte dédié au soleil comme on l’entend souvent dire. Il s’agit bel et bien d’une re-Connaissance d’une divinité transcendante qui se manifeste symboliquement par la Lumière du soleil. Quand des phénomènes solaires se produisent dans les grottes, à Ornolac ou ailleurs, à des moments clés de l’année( solstices d’été ou d’hiver), il s’agit en fait des noces de la Lumière avec la Grand Déesse Mère, de la Lumière qui luit dans les ténèbres, de l’Esprit qui transcende la Matière, de l’Acte d’Amour Universel. Toutes les traditions nous racontent ce « mystère » et ce symbolisme des cavernes sacrées.
Chaque religion a ensuite dévié de ce culte originel, par la faute d’hommes de plus en plus enfoncés dans la temporalité et le matérialisme.
Le christianisme n’a pas échappé à cette dérive alors que le message christique est on ne peut plus clair : Le Christ est la manifestation du « Grand Esprit Inconnaissable » qui vient prouver que seul l’Amour reconduit au Père.
Antonin Gadal, pour sa part, était persuadé que les Bonshommes cathares du Sabarthez avaient perpétré cette grande tradition initiatique. On ne peut pas hélas, s’appuyer sur un quelconque document attestant cette hypothèse, les autodafés ayant fait leur œuvre, mais on peut et on doit s’interroger.

Alexander et Valeria Fol, de l’Academie Bulgare des Sciences ont étudié, avec d’autres scientifiques, les relations que l’on pouvait établir entre l’orphisme et le bogomilisme. Comme le catharisme,le bogomilisme est issu de la doctrine des premiers chrétiens qui eux-mêmes détenaient cet enseignement non pas d’un personnage nommé Jésus mais d’une entité intemporelle qu’on a appelé Christ et qui, des siècles auparavant, était nommée Orphée (1).

Autrement dit, « rien de nouveau sous le Soleil ».

A lire ici quelques fragments éloquents des études d’Alexander (texte en français) et Valeria Fol (texte en anglais) sur le sujet.

(1) On peut consulter sur wikipédia un article intéressant sur l’orphisme mais, pour plus de détails, la lecture de “Orphée et l’orphisme” de Reynal Sorel est très instructive. On y apprend notamment que l’orphisme refusait de sacrifier tout être vivant et de commettre le moindre meurtre, ce qui allait à l’encontre des religions établies à l’époque. Les pythagoréens avaient également cette répulsion pour une nourriture carnée mais ils voulaient changer la vie politique en y participant. Reynal Sorel ajoute “l’orphisme ne goûte pas aux subtilités pythagoriciennes : son but n’est d’ailleurs pas de réformer la Cité de l’intérieur, mais de s’en échapper.” Un objectif que les cathares n’auraient pas renié! Par ailleurs l’auteur rappelle que les initiés orphiques emportaient dans leur tombe, affichée contre leur poitrine, une lamelle d’or sur laquelle était inscrit :” Je suis Fils de la Terre et de la voûte étoilée, mais ma race est Céleste.” Peut-on affirmer de plus belle manière que notre parcelle divine quitte son corps de boue pour retourner au Père? C’est étonnant, surtout ainsi relaté six siècles avant l’ère chrétienne.